Le taux d’équipement en smartphone à l’échelle mondiale atteindra 66% en 2018 selon Zenith. Différentes études montrent également que le mobile représente un canal majeur de consommation de la vidéo. Ericsson prévoit par exemple que la moitié (50%) de la consommation de contenus audiovisuels se fera sur terminaux mobiles d’ici 2020.
En Afrique subsaharienne, GSMA estimait au deuxième trimestre 2017 à 436 millions le nombre d’abonnés uniques au mobile. Parmi ces abonnés, 24% de ceux équipés de terminaux compatibles utilisent les services d’intelligence artificielle tels que les assistants virtuels, selon Deloitte.
On peut aussi évoquer les smartwatch et autres dispositifs connectés (smart TV, enceintes connectées, divers équipements domotiques, etc.) dont les usages progressent. Le digital est donc de plus en présent dans la vie des consommateurs, toutes régions confondues dans le monde, certaines étant plus en avance dans les usages que d’autres. Mais tout ne semble pas donné pour les éditeurs de services digitaux. Tel est le principal enseignement de l’édition 2017 de Connected Life, une étude globale de Kantar TNS. L’institut relève en effet un niveau plutôt élevé de scepticisme envers les marques digitales dans la plupart des marchés matures, à l’inverse des marchés en développement où les niveaux de confiance sont moins dramatiques et parfois même très porteurs d’opportunités.
L’étude
En Afrique du Sud et au Nigéria par exemple, 36% et 54% des consommateurs digitaux déclarent respectivement faire confiance aux grandes marques globales. Aux USA et en France, ils ne sont que 21% et 15% à indiquer la même chose. La différence est saisissante et est d’ailleurs commentée par Stephen Hillebrand, CEO Insights de Kantar MENA : « Dans le monde connecté, la notion de confiance est sous une pression croissante. Par défaut, beaucoup de consommateurs sont dans une position de suspicion, de non acceptation. Les niveaux de suspicion varient de façon importante selon la région du monde où on se situe. Dans les pays développés, l’érosion de la confiance a été beaucoup plus dramatique, suscitée par l’expérience consommateur des nouvelles technologies, des contenus online, de l’usage de la donnée personnelle et du e-commerce. A l’inverse, les niveaux de confiance globale en MEA sont relativement élevés, offrant une opportunité aux marques de la région » .
La vague 2017 de Connected Life décrypte la confiance suscitée par les marques dans quatre domaines que sont la technologie, les contenus, les données et le e-commerce. Elle a interrogé 70 000 personnes dans 56 pays, dont 5 en Afrique : l’Egypte, l’Afrique du sud, le Ghana, le Nigéria et le Kenya. 104 entretiens en profondeur ont aussi été conduits.
La confiance dans la technologie
En Afrique et au Moyen-Orient (MEA), 43% des consommateurs connectés (36% en Afrique du sud) indiquent faire confiance à la technologie de l’intelligence artificielle. Ils déclarent être prêts à interagir avec des chatbots par exemple s’ils peuvent les aider à traiter plus rapidement leurs requêtes. Selon les analystes de Kantar TNS, les marques pourraient donc, dans cette région, davantage automatiser la relation client, à l’instar de Jumia qui vient de lancer un bot e-commerce au Nigéria. Mais 43%, ça ne fait pas beaucoup. A l’échelle globale, ils ne sont d’ailleurs que 39%. Ce qui reflète qu’il y a encore beaucoup de shoppers qui expriment de la méfiance, ou au moins de l’indifférence, envers ce type de technologie. En Afrique du Sud par exemple, ce sont 34% de shoppers digitaux qui rejettent toute idée de converser avec un bot.
Aussi, une part substantielle du public cible a l’impression de faire l’objet d’une sur-sollicitation (notifications, mises à jour, mails, newsletter, etc.) de la part des marques. 34% en moyenne de 16-24 ans sur l’ensemble des 56 pays étudiés indiquent notamment qu’ils se retrouvent à trop utiliser leurs mobiles pour cette raison. L’étude de Kantar relève une proportion comparable (32%) en MEA (36% au Kenya ; 37% en Afrique du sud).
Confiance dans les contenus sur les réseaux sociaux
En ce qui concerne les contenus diffusés par les marques, en l’occurrence sur les réseaux sociaux, l’étude sonde d’un côté la confiance, la fiabilité et de l’autre la pertinence, l’utilité pour la cible. En MEA, seule une petite moitié des personnes interrogées font confiance aux contenus auxquels ils sont exposés sur les médias sociaux. En Afrique du sud, 27% jugent carrément non fiables les informations circulant sur les réseaux sociaux. En France, ce taux grimpe à 53%. Dans ce pays, mais aussi en Amérique du Nord, ils sont même 50% à juger préoccupant le fait que les plateformes sociales ne contrôlent ou ne maîtrisent pas les informations qu’elles diffusent et auxquelles elles donnent accès. Dans ces deux territoires, les consommateurs expriment une vraie défiance envers les news sur les réseaux sociaux. Les torrents de fausses informations charriées par les plateformes sociales lors des dernières élections présidentielles aux USA et en France y sont certainement pour quelque chose. Sur le marché sud-africain, 31% des personnes interrogées expriment elles aussi leurs préoccupations sur le sujet, 28% au Nigéria.
Dans ce dernier pays, 53% des répondants jugent pertinents pour eux les contenus de marque auxquels ils sont exposés sur les réseaux sociaux. Ils sont 38% en Afrique du sud. A l’inverse, 31% des répondants de la nation arc-en-ciel et 23% au Nigéria estiment non pertinents les contenus de marque sur les réseaux sociaux. Globalement, un quart (25%) des répondants en MEA trouvent que les contenus diffusés par les marques sur les réseaux sociaux ne les adressent tout simplement pas.
Confiance dans la donnée
Pour ce qui est de la donnée, 35% des consommateurs digitaux en MEA (32% au Nigéria ; 39% en Afrique du sud) et 40% dans les 56 pays sont préoccupés par les quantités de leurs données personnelles détenues par les marques. Ils estiment trop élevé le prix qu’ils doivent payer pour avoir un mode de vie connecté et accéder à des services digitaux qui, ils le reconnaissent, leur facilitent la vie. Beaucoup ont le sentiment d’être perdants et subissent en la matière une relation déséquilibrée avec les marques.
Globalement, nombreux sont les consommateurs connectés qui font le choix de la confidentialité (de leurs données personnelles) au détriment de la praticité, de la facilité et de la célérité que pourraient leur offrir certains services ou applications dans la réalisation de certaines tâches. Par exemple 43% des utilisateurs actifs d’internet rejettent l’idée que des dispositifs connectés puissent mesurer leurs activités même s’ils leur facilitent la vie. En Afrique du sud, ce taux descend à 34%. Kantar note que sur les marchés en développement en général, la part des consommateurs exprimant de la défiance envers les dispositifs connectés est plus faible que sur les marchés matures.
Confiance dans le e-commerce
Enfin, sur le sujet du e-commerce et particulièrement du paiement mobile, pendant que 64% des consommateurs en Chine préfèrent payer par mobile tout ce qu’ils achètent, ils sont moins friands de ce type de service en MEA. En Afrique du sud par exemple, ils sont seulement 31% à exprimer une telle préférence, 46% au Kenya. Au Ghana, 44% des répondants le rejettent. Ce marché ouest-africain se situe dans la moyenne globale qui est de 40%.
En Afrique du Sud, l’étude cite également l’accès internet moins coûteux, comme l’un des facteurs pouvant inciter les shoppers digitaux à davantage acheter online. Cela fait écho au hashtag #datamustfall lancé depuis plusieurs mois sur Twitter dans le pays, et qui est longtemps resté l’un des trending topics sur le réseau social, obligeant d’ailleurs plusieurs officiels du pays à lancer un appel aux telcos afin qu’ils baissent leurs tarifs data, notamment sur mobile. Ces derniers ont commencé à répondre à cet appel depuis quelques semaines. Vodacom et MTN ont dernièrement lancé des offres data plus accessibles.
Crédit photo de couverture : visualhunt/omran.jamal